04 mars 2007

Rimbaud l'insupportable (ébauche)

Ce texte est né d’une brève discussion avec le spectre d’Ivan. Je l’en remercie.

L’envie m’est venue, à l’issue de cette discussion, de dire qui est Rimbaud pour moi. C’est très complexe, et en même temps, très simple, évident même.

Rimbaud selon moi, et le peintre Ernest Pignon-Ernest le souligne à juste titre, on ne peut l’encadrer.

« … lorsqu’on a lu Rimbaud, vraiment, on sait que l’on ne peut pas en faire un portrait. Je veux dire qu’on ne peut pas faire un Rimbaud en marbre, en bronze, un Rimbaud sur un socle ou dans un cadre. »

Ceux qui peuvent l’encadrer, ceux qui, fans ou supporters, comme des cons de socles bêtement le supportent, l’élèvent béatement aux nues, le font de bronze ou de marbre, ceux-là ne l’ont pas lu. Car on est forcément trop « bourgeois » pour lui, pour le lire. Rimbaud c’est d’ailleurs, on le sait bien, c’est la doxa qui veut ça, un voyant doublé d’un voyou. L’Arthur ne serait donc guère fréquentable. On dit ça. Avec un certain confort même. Car Rimbaud est passé classique. Pléiadisé. Emballez, c’est pesé. Comme si on avait fini de le découvrir. Il est lu et relu. Il est bien au chaud dans les bibliothèques du monde entier. Tout se passe comme si on n’avait plus besoin de le lire, de le faire exister. Mesdames et messieurs, Rimbaud ne mordra plus personne. Il est « colliérisé » dirait Ferré. On peut l’encadrer.

Il suffit, au café, d’évoquer son nom (ces discussions littéraires dans les bistrots !), pour qu’on se fasse une idée de la poésie : Rimbaud c’est la poésie même voyons ! Y a qu’à écouter Ferré interpréter le « Bateau ivre » : c’est ça Rimbaud, qu’on vous dira, au mieux, dans les bistrots. Il y a comme un concept « Rimbaud » (de même qu’il y a un concept « Ferré » …). Et ce concept, cette tarte à la crème plutôt, vous empêche de penser Rimbaud. Pire : vous dispense d’en faire l’expérience.

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